Contre les pressions occidentales, Moscou peut-il soutenir J. Kabila ?

L’internationalisation de la crise politique en République démocratique du Congo, à la suite notamment de la conclusion de l’Accord politique global et inclusif du Centre interdiocésain de Kinshasa, a davantage ouvert l’espace congolais à des jeux de puissances.

Un peu plus d’un quart de siècle après la fin de la Guerre froide et la victoire du complexe bloc occidental, la RDC est l’objet de la projection de moult acteurs étatiques majeurs de la vie internationale.
Le rapprochement aux conséquences fâcheuses avec la « taciturne Chine » n’ayant pas produit d’effets escomptés notamment sur le plan sécuritaire, le pouvoir de Kinshasa reste butté à des pressions occidentales dont l’intensité semble aller crescendo. Pour l’heure, c’est officiellement suite à la non tenue de l’élechtion présidentielle en 2016.
Au-delà du « ping-pong » entre la Majorité présidentielle et l’opposition politique au sujet de la mise en œuvre de l’Accord politique du 31 décembre 2016, au-delà de la controverse en cours sur la volonté politique et la possibilité technique de la tenue de la présidentielle en décembre 2018, au-delà de la polémique sur la possibilité constitutionnelle d’un nouveau mandat pour le Président sortant, etc., la filière scientifique des Relations internationales, à laquelle je m’identifie, m’astreint à réfléchir sur le rôle qu’en ce temps qui court, la Russie de Vladimir Poutine peut s’attribuer en RDC, un incontestable enjeu international.
La Russie, qui s’évertue- en dépit des difficultés économiques – à affirmer énergiquement sa puissance et à la consolider à travers une posture diplomatico-stratégique de plus en plus contraire au camp occidental, peut chercher à agir non moins manifestement en RDC dans la perspective de relever le défi d’entrer de plain-pied en Afrique. Ce d’autant plus qu’à la suite de l’attitude quelque peu distante que l’Administration Trump parait afficher politiquement à l’égard du continent africain, le champ congolais est plus à la portée des puissances européennes qui militent pour un meilleur repositionnement sur cette aire. Ceci implique, dans la perspective d’assurer le contrôle de l’initiative politique à Kinshasa, le concours en leur faveur des « Africains » exerçant ou ayant exercé de l’influence sur la RDC.
Dès lors, il est fort possible que Vladimir Poutine, nostalgique de la défunte URSS, soit pleinement disposé à apporter à son homologue congolais le soutien dont ce dernier aurait besoin pour autant que ceci constituerait une brèche pour placer la Russie au cœur de l’Afrique. Ce après les échecs de l’ex-URSS à ce propos. La clarté des positions diplomatiques de Moscou et, partant, sa détermination à assumer ses options stratégiques sur les espaces où il se déploie à l’instar de la Syrie, de l’Iran ou du Venezuela, peuvent constituer, pour Kinshasa, une garantie de sa défense contre les pressions occidentales.
Généralement, la rhétorique diplomatique de Moscou repose sur l’obligation internationale de respecter la souveraineté des Etats tel qu’il ressort de la Charte de l’ONU. C’est à ce titre que, lors des débats au Conseil de sécurité de l’ONU ayant précédé le vote de la Résolution 2409 sur la situation en RDC, il avait mis en garde, au sujet des élections qui vont couler salives et ancres dans ce pays, les puissances occidentales contre toutes violations de la souveraineté de ce pivot géostratégique au centre de l’Afrique. Cette stratégie discursive ne laissera certainement pas indifférente Kinshasa qui fait face à une hétéroclite opposition politique soutenue par des instances occidentales, notamment européennes.
Reste à savoir jusqu’où Moscou pourrait offrir ses services à Kinshasa, et les conséquences de la construction de l’axe Moscou-Kinshasa sur la stabilisation de l’espace congolais. Le « strabisme » dont souffre la classe politique congolaise ne rassure pas – encore – quant à un avenir durablement apaisé. D’autant plus que la complexité de la « réalité politique congolaise » porte – toujours – atteinte à l’effectivité de l’indépendance de l’Etat congolais. Le jeu de politique interne reste ainsi moins déterminé par l’engagement des hommes politiques à œuvrer véritablement et opiniâtrement pour le bien-être de la population congolaise que par leur niveau de manipulation au profit de tierces parties. Ceci laisse libre cours aux jeux de puissances qui pourraient, à nouveau, s’affronter en RDC, loin des intérêts des Congolais.
Pour la RDC, le défi majeur reste ainsi de maîtriser et d’exercer fermement et efficacement l’initiative politique pour l’amélioration des conditions sociales des populations et le développement de l’Afrique. Sans ignorer le reste du monde. Pour ce faire, les Congolais doivent gagner le pari de l’unité nationale.
Martin ZIAKWAU L.
Internationaliste

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